Bourgeons de printemps

Avec ses paillettes dorées et son nectar sucré, le saule aux mille qualités offre un printemps avant l’heure. Joignons-nous à ses visiteurs en fête.

Pendant une promenade au bord de l’eau, un scintillement argenté attire tout à coup le regard. Un mirage ? Non, un saule couvert de chatons cotonneux tendus vers le ciel dans un élan inespéré. Comme des grelots dansant dans le vent, ces grappes de fleurs annoncent les prémices de la belle saison. En rangs serrés sur les chatons, elles s’offrent dans leur plus simple appareil, sans pétales ni sépales. Ce sont juste des étamines qui confient leur pollen au vent. La poudre sera réceptionnée sur l’arbre voisin par des chatons femelles hérissés d’ovaires vert pomme. Car chez les saules, il y a des pieds femelles et des pieds mâles qui s’unissent par le vent… mais aussi par des pollinisateurs.
L’arbuste bourdonne déjà, il doit sentir le sucre à plein nez. Cette floraison est une aubaine pour les abeilles, bientôt rejointes par des mouches, coléoptères et autres papillons… Plus de cinquante espèces apprécient cette plante-hôte et parfois en dépendent. Plus un saule est vieux, plus il sera riche en vie. Surtout s’il s’agit d’un saule taillé en têtard dont les cicatrices sont une porte d’entrée pour champignons, bactéries ou insectes xylophages. Quelques charançons pondent leurs œufs dans les chatons, des larves de longicornes et de cétoines minent le bois ou se tortillent dans le terreau accumulé entre les interstices.

Un paradis pour les oiseaux

Tout à coup, une branche vibre. Les oiseaux viennent à la rescousse ! Une mésange bleue examine une première grappe. Pendue à l’extrémité d’une fine branche, elle cueille les œufs, larves, pucerons et autres parasites protéinés par des coups de bec précis. Le fin rameau qui soutient cette acrobate à plumes est incroyablement flexible et robuste! On comprend bien pourquoi le saule est choisi pour la vannerie, technique de tressage pratiquée depuis l’âge du bronze.
Au sommet de l’arbuste apparaissent les premières feuilles. Elles annoncent une explosion de vert imminente. Vivement la prochaine neige ! Quand les minuscules graines du saule se détacheront par milliers des fruits bien mûrs et danseront comme des flocons légers grâce à leurs longs plumets.

Miel d’hybride

En plus d’être le genre le plus étendu parmi les ligneux, le saule a une joyeuse propension à faire des hybrides, eux-mêmes fertiles. Il faut plusieurs critères pour les identifier avec certitude : fleurs, feuilles, fruits…, qui n’apparaissent jamais tous en même temps. Le genre Salix comprend 500 espèces dont une trentaine en Europe centrale, un véritable cauchemar pour les botanistes !
Ces croisements ne dérangent pas les pollinisateurs qui se gavent de nectar parfumé. Celui-ci est produit par des glandes, à la base des fleurs, appelées nectaires. Le saule profite aux abeilles domestiques, mais aussi aux andrènes, osmies et autres abeilles solitaires. Les reines de bourdons y puisent l’énergie nécessaire pour fonder leur colonie, et les pucerons se branchent sur les canaux qui conduisent la sève à l’extrémité des pousses. Le miellat sucré qu’ils rejettent sera ensuite collecté par les fourmis et les abeilles.

Textes Sofia Matos & Sophie Giriens (La Salamandre), Dessins et notes de terrain Jerôme Gremaud

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