Bénédicte et Michel Bachès

Implantée dans les Pyrénées-Orientales, au pied du mont Canigou, la pépinière d’agrumes de Bénédicte et Michel Bachès est le résultat d’une hybridation de plusieurs histoires, d’amour et de passions, qui ont magnifiquement porté leurs fruits.

Profil

Âge 62 ans.
Lieu de naissance

Michel à Prades, dans les Pyrénées‑Orientales, sur les terres de l’actuelle pépinière Agrumes Bachès. Bénédicte à Fès, au Maroc.

Parcours

Michel : capacité agricole de pépiniériste et formation comme compagnon dans diverses pépinières de France, à Paris, Angers, Carpentras…

Bénédicte : présidente de l’association Plantes et Cultures.

Moments-clés    

Les rencontres, avec des chefs comme Alain Ducasse, Pascal Barbot, William Ledeuil, Laurent Lemal… Également avec les Japonaises Keiko Nagae (Arome) et Yumiko Aihara qui les ont guidés lors de leurs deux voyages au Japon.

Activité 

Agrumiculteurs, producteurs de fruits.

Vous revenez tout juste d’un congrès sur les agrumes au Brésil. Quelle est cette facette de votre métier d’agrumiculteur ?   

Tous les deux ans, nous allons à des congrès internationaux partout où poussent des agrumes. Cette année, l’International Citrus Congress se tenait au Brésil, premier producteur d’oranges au monde. En tant que petite structure française à côté des géants dans ce domaine, nous apprécions la découverte d’autres pépiniéristes. À chaque déplacement, nous en apprenons toujours plus sur la façon dont les agrumes poussent dans telle ou telle région du monde et sur leur place dans la culture des différents pays : Californie, Japon, Italie, Maroc, Vietnam, Argentine, Chili, Australie, Portugal, Espagne… Cela nous permet de comparer avec ce qui se passe en France. Grâce aux agrumes, nous sommes devenus des jardiniers-explorateurs ! Et nous aimons transmettre nos découvertes horticoles et gustatives aux Français.   

Pourquoi cette passion pour l’agrume ?   

Au départ, Michel était un pépiniériste passionné par tout ce qui pousse, absolument tout ! Dans les années 80, installé sur les terres familiales, il produit une grande quantité de plantes, par bouturage, semis ou greffe. Dans les années 90, je reviens « au pays », ce Sud de nos premiers amours, et nous nous retrouvons. C’est le début d’une fabuleuse aventure personnelle et professionnelle. Pour pouvoir le suivre dans son métier, je comprends qu’il faut faire un tri et me vient un coup de cœur pour l’agrume, ce fruit originaire d’Asie du Sud-Est qui pousse en hiver et dont l’arbre aux feuilles persistantes est très beau… Un souvenir de mes origines marocaines aussi, sans doute. Toujours est-il que Michel et moi sommes tombés d’accord : nous allions nous spécialiser dans le genre Citrus et devenir une référence dans ce domaine. 

En vous intéressant aux agrumes, vous avez découvert un monde végétal extrêmement riche. Mesuriez-vous son ampleur ? 

À ce moment-là, pas du tout… Nous continuons d’ailleurs toujours de faire de fabuleuses découvertes ! Nous pensons même qu’il est impossible de faire le tour de la question, tellement l’agrume s’hybride et renaît de mille façons. C’est un des genres de fruits les plus vendus au monde, avec plus de mille variétés connues ; un marché économique important… 

Est-il facile de faire pousser des agrumes à Eus, entre Perpignan et Prades ? 

Eus est classé parmi les Plus Beaux Villages de France et l’on dit que c’est le plus ensoleillé du pays : voilà notre atout principal, avec également l’eau des montagnes, disponible à profusion. Notre inconvénient, en revanche, c’est le climat sec et venteux en hiver. Sur nos quatre hectares, nous cultivons donc, sous serre, nos agrumes originaires des régions subtropicales, en surveillant bien l’irrigation et la résistance au froid de chacune des différentes variétés. L’agrume réserve bien des surprises : il réussit à s’adapter à différents climats et saisons. Nous avons observé, par exemple, qu’au Japon ils luttent contre l’humidité pour pousser, alors qu’en Californie, ils doivent combattre la sécheresse ; et pourtant, ils s’implantent dans les deux pays ! La réussite de leur culture est donc liée à l’histoire de l’homme et à son travail. Alors nous, au pied du mont Canigou, nous travaillons aussi à créer les meilleures conditions pour nos agrumes, à partir d’une donnée essentielle : l’excellente luminosité dont nous bénéficions et qui nous permet une forte mise à fruit. Ainsi, nous créons des agrumes uniques, différents de ceux d’autres pépinières. Il faut savoir tirer parti des inconvénients !    

Et, en plus, vos cultures sont biologiques ! N’est-ce pas un « pépin » supplémentaire ? 

L’arôme fort des agrumes attire les nuisibles, ce qui nécessite souvent, en agriculture traditionnelle, un traitement intensif. Or, cultiver des agrumes bio est une évidence pour nous, dans un monde où ils sont énormément traités. Pour aider nos plants autrement qu’à coups de pesticides, nous huilons leur tronc avec du savon noir bio et nous les arrosons, quand c’est indispensable, au jet fort pour faire tomber les bestioles. Notre philosophie, c’est de laisser la nature créer de nouvelles variétés alors que, sur le marché mondial, celles-ci sont aujourd’hui toutes construites. Nous préférons fixer notre critère sur le goût, plutôt que sur la beauté lisse d’un fruit, sa facilité de transport ou sa mention « sans pépin » justement… .

Dans le citron, tout est bon !

Acide, amer, doux… les agrumes réservent tout un éventail de saveurs en bouche. Et cette texture ! Qui, mieux que des spécialistes de la haute gastronomie, peut mettre en valeur toutes les nuances des mille variétés cultivées dans les serres de la pépinière Bachès ? Ainsi, depuis une dizaine d’années, Michel et Bénédicte travaillent main dans la main avec des personnalités de la restauration, étudiant ensemble les meilleures utilisations de chaque agrume, son jus, sa chair, son zeste, son albédo…

Citron caviar, yuzu, cédrat, bergamote, bigarade, pomelo, tangerine, kumquat, calamondin : les chefs, comme Laurent Lemal, William Ledeuil, Pascal Barbot, Alain Ducasse, entre autres, viennent à la pépinière comme dans la caverne d’Ali Baba pour trouver ce qui, dans cette collection la plus grande d’Europe, relèvera leur nouvelle création culinaire. Michel et Bénédicte ont, par exemple, été les précurseurs de l’introduction du citron caviar en France, il y a vingt ans, après l’avoir découvert en Australie ; ils ont aussi fait planter un yuzu à Pierre Hermé, à Paris.

Et, outre les recherches sur de nouvelles espèces, le couple se passionne également pour la réhabilitation de variétés oubliées et qu’ils aiment refaire surgir de l’Histoire, comme le cédrat ‘Poncire de Cotlliure’. « L’utilisation du citron, de l’orange, de la mandarine et de la clémentine, pour ne citer que les plus classiques, est assez récente dans l’élaboration des plats, explique Bénédicte Bachès. Petit à petit, en France, sur le modèle de l’Italie, nous avons appris à aimer l’amertume.

Aujourd’hui, c’est un fabuleux exhausteur de goût qui apporte beaucoup de fraîcheur en cuisine. » Une source inépuisable de nouvelles sensations, dont Michel et Bénédicte n’ont pas fini de percer le secret.      

En savoir plus

Agrumes Bachès

Mas Bachès, 66500 Eus.

Tél. 04 68 96 42 91.

www.agrumes-baches.com

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